L’aide aux jeunes entrepreneurs issus de la diaspora africaine : accompagner les projets pour les rendre viables


Le festival Afri’ca (le FACA, en abrégé) s’est donné pour but de mettre à l’honneur l’Afrique et les citoyens d’origine africaine de la région de Charleroi. Pour sa troisième édition toujours organisée en marge de la journée mondiale de l’Afrique, ses organisateurs ont ajouté une activité à son programme : un afterwork consacré à la problématique de « Jeunesse et entrepreneuriat ». L’occasion d’offrir au public trois axes de travail : le témoignage de jeunes entrepreneurs, le partage d’expérience et surtout la présentation d’outils et d’aides disponibles en Belgique pour les jeunes candidats entrepreneurs.

Si se lancer dans la création de son propre emploi est un défi compliqué en soi pour un jeune, cette étape peut s’avérer un véritable parcours du combattant si ce jeune est d’origine étrangère, africaine notamment. C’est pour venir en aide à ces audacieux que le CRIC (Centre Régional d’Intégration de Charleroi), partenaire du FACA, a ouvert ses locaux à l’initiative visant à mettre en vitrine une série d’outils et structures d’accompagnement des jeunes entrepreneurs.

Un microcrédit professionnel accompagné

L’un des principaux obstacles auxquels se heurte le jeune candidat entrepreneur, c’est incontestablement la question de l’argent. Généralement, sans mise de fond de départ, pas de projet possible. Créée en 2010 en Belgique, microStart est une organisation composée d’une coopérative à finalité sociale et d’une asbl. Elle se présente comme une alternative au refus bancaire, rôle qu’elle remplit en offrant une formule de microcrédit professionnel accompagné.

Tout en stipulant d’emblée que microStart n’est pas une banque, son représentant, David Taquin, décline les services proposés aux jeunes entrepreneurs. On y retrouve un accompagnement (gratuit) en amont du projet, avec formation en gestion, structuration du projet, e-learning… S’y ajoute un financement pour un montant compris entre 500 et 15.000 euros, constitué d’un emprunt seul ou en groupe moyennant un garant pour la moitié de la somme, sans exclusion de secteur d’activités (ce qui est souvent le cas auprès des banques, pour des domaines comme l’Horeca, par exemple). microStart offre aussi une solution transitoire pour les entrepreneurs en difficulté : par exemple, une personne ayant contracté des dettes suite à un imprévu ou ayant rencontré des frais imprévus dans son activité.

Une plate-forme d’accompagnement

Afropreneur est une plate-forme d’accompagnement des jeunes entrepreneurs issus de la diaspora africaine. Beaucoup de ces jeunes se retrouvent en difficulté parce qu’ils sont isolés ou pas soutenus par leur famille. Cette plate-forme organise une formation pour déterminer où le candidat entrepreneur se situe et ce qu’il souhaite développer. L’idée générale est de donner l’envie d’atteindre l’excellence, de mettre les personnes en position de leader et de leur insuffler de l’autodétermination, c’est-à-dire de faire en sorte qu’elles ne se laissent pas déterminer par autrui dans le choix de leurs projets.

Pour mener à bien ces missions, Afropreneur organise des « meet-ups » (qu’on pourrait traduire par « soirées de réseautage ») au cours desquels les jeunes entrepreneurs rencontrent un entrepreneur de la diaspora africaine qui a réussi. Ces rencontres conjuguent plusieurs approches : le rôle de modèle de l’entrepreneur rencontré, la présentation de « success stories » et du « networking », c’est-à-dire la création de réseaux de partenariat. Une fois par an a lieu un « bootcamp » (littéralement, un camp de rencontre) au cours duquel s’élabore la première ébauche du projet, autrement dit lors de laquelle on passe de l’idée au projet, en tenant compte de l’adéquation entre la personnalité du candidat entrepreneur et son projet.

S’ensuit un accompagnement d’une période de six à neuf mois avec des coaches, jusqu’au moment où intervient la phase des Awards qui voit chaque candidat présenter son projet au public et à un jury d’experts. La première édition de ce parcours, clôturée en mars dernier, a couronné une lauréate qui a bâti un projet visant à prodiguer des conseils de techniques de vente et de marketing aux coiffeuses qui lancent leur commerce à Bruxelles.

Entreprendre dans le secteur alimentaire

Dans un registre connexe à celui d’Afroentrepreneur, The Food Bridge a été fondé en 2014. Cet organisme financé par la région flamande s’est centré sur la nourriture en tant qu’outil pour établir des ponts entre les gens et les communautés. L’idée est que la nourriture est une marque d’identité importante, un moyen d’établir des relations entre individus et groupes. Dans ce contexte, The Food Bridge vise à promouvoir les cultures alimentaires, non seulement comme un moyen de partage d’expériences communautaires, mais surtout comme outil de développement viable, avec l’idée maîtresse que les populations devraient avoir la maîtrise sur leur système alimentaire, de la production à la consommation.

Pour être éligibles par The Food Bridge, les projets des jeunes entrepreneurs doivent réunir un certain nombre de critères. Ils doivent être menés par un Africain domicilié en Europe, de tout statut (indépendant, start-up, étudiant, chercheur, etc.), pour un projet situé en Afrique, intégrant du profit, neuf ou ayant moins de cinq ans d’existence, ayant un impact écologique, sociétal et économique (c’est-à-dire, essentiellement, jumelant préoccupation de l’environnement et création d’emploi) et nécessitant un investissement inférieur à 100.000 euros.

Le cheminement pour bénéficier d’un financement conjugue un bootcamp et du coaching. Parmi ses étapes figurent, entre autres, un appel à projets, une présentation de projet devant un jury d’experts et une formation à travailler dans le cadre d’un « business model ». Chaque personne ou équipe (dont les participants peuvent être non-Africains) se voit attribuer un coach compétent dans le secteur d’activités de son projet. « Les projets sont souvent très créatifs, mais peu viables, explique Maureen Duru, fondatrice et directrice de l’asbl. Le principe est de travailler à les rendre viables. Et la formation vise à apprendre aux jeunes entrepreneurs à structurer leur business plan, mais aussi à le présenter devant des investisseurs. »

Dominique Watrin