Rapport Myria : Retour, détention et éloignement des étrangers en Belgique


Identification des éléments porteurs du rapport

Chiffres concernant l’année 2017 :

  • 5 % de moins de décisions de retour qu’en 2016
  • 50 % de moins de décisions d’interdiction d’entrée depuis 2015
  • 30 % des arrestations se sont fait dans le cadre des migrations de transit (personnes ne voulant pas demander l’asile en Belgique et voulant rejoindre un autre pays européen)
  • 14 % de moins de retours volontaires assistés qu’en 2016
  • Hausse importante des refoulements (décisions de refus d’accès délivrées à la frontière)

Evolutions récentes :

Cour de justice de l’UE (CJUE) :

  • Arrêt K.A. et autres, du 8 mai 2018 : le seul fait de faire l’objet d’une interdiction d’entrée ne peut pas impliquer le rejet automatique de toute demande de regroupement familial, sans que les circonstances propres à la situation ne soient examinées
    ! Attention, l’Office des étrangers ne se conforme pas à cet arrêt, et continue d’appliquer des refus automatiques. Dans ces cas, il faudra faire appel à un avocat.

Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH) :

  • Arrêt X. du 9 janvier 2018 : l’éloignement d’un ressortissant Marocain considéré comme terroriste vers le Maroc risque de le soumettre à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants. Cet arrêt est basé sur des rapports internationaux indiquant que les personnes suspectées de terrorisme sont soumis à la torture au Maroc.
  • Arrêt M.A. du 1er février 2018 : arrêt similaire concernant un ressortissant Algérien.

 

Niveau belge :

  • Le projet de loi sur les visites domiciliaires a été mis de côté.
  • Une attention particulière est portée par l’Office des étrangers sur les personnes qui bénéficient d’une protection internationale et qui se rendent pour un séjour dans leur pays d’origine. Attention aux retraits/abrogations de statut et retraits de séjour en Belgique !
  • Lois « Mammouth », en matière d’asile : la procédure d’asile est modifiée à plusieurs égards. Notamment :
    o un ordre de quitter le territoire (OQT) n’est plus délivré automatiquement après une décision négative du CGRA mais seulement après l’expiration du délai de recours contre la décision ou après le rejet du recours introduit. En attendant, l’attestation d’immatriculation est prolongée.
    o Il y a de nouveaux délais de recours, plus courts, lorsque la personne est en détention (5 ou 10 jours en fonction des cas).
  • L’obligation d’examiner le risque de mauvais traitement avant tout éloignement, même si la personne n’a pas introduit de demande d’asile (cas typique des « transmigrants ») a été consacrée par la jurisprudence suite à l’affaire des Soudanais renvoyés au Soudan.
  • Les rapatriements vers la Grèce dans le cadre du règlement Dublin ont repris : le système d’asile en Grèce n’est plus considéré comme faisant l’objet d’une défaillance systémique.
  • Point de départ de l’interdiction d’entrée (arrêt Ourhami de la CJUE, appliqué par le Conseil d’Etat) : le délai de l’interdiction d’entrée ne commence à courir qu’après que l’intéressé a effectivement quitté le territoire.

FOCUS : Détention et protection de la vie familiale

Détention de familles avec enfants mineurs
Des unités familiales ont été ouvertes au centre fermé 127bis.
Des règles spécifiques de fonctionnement des centres fermés pour les familles ont été établies dans un arrêté royal du 1er août 2018.
Jusqu’ici, trois familles y ont été détenues.

Femmes enceintes
Il n’existe pas de protection contre la détention ou l’éloignement, mis à part le fait que l’éloignement forcé ne peut plus être réalisé à partir de la 28ème semaine de grossesse.

Etablissement du lien familial en détention
Une nouvelle loi « reconnaissances frauduleuses » (entrée en vigueur en avril 2018) établit des formalités plus lourdes qu’avant pour toute reconnaissance d’un enfant. Elle donne la possibilité à l’Officier d’état civil de refuser la reconnaissance s’il l’estime frauduleuse (faite dans le but d’obtenir un avantage en matière de séjour), ou de surseoir à l’acter pour mener une enquête.
Conséquences pour les personnes en détention :
Les notaires ne sont plus compétents pour établir un acte de reconnaissance de paternité, mais ils gardent certaines compétences pouvant être utiles à des personnes détenues :

  • Compétence pour acter le consentement de la mère,
  • Compétence pour représenter, avec un mandat spécial et authentique, l’étranger auprès de l’administration communale.

Autre possibilité théorique : que l’Officier d’état civil se déplace au centre fermé.
Il n’existe aucune protection contre l’éloignement pendant la procédure de reconnaissance de paternité.
Introduire une demande de regroupement familial en détention
Il existe la possibilité d’introduire la demande par courrier recommandé (validé par la jurisprudence du Conseil du contentieux des étrangers et du Conseil d’Etat).
La demande pourrait également être introduite par un avocat ou un membre de famille.
Tout refus d’enregistrement de la demande de regroupement familial, même oral, peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil du contentieux des étrangers.